BEFORE THE STORMAssis sur ce banc d’église, Jamie à les mains qui se rejoignent, levée devant son nez. Son père fait un énième sermon. Il le fait si bien. Jamie a toujours admiré sa bienveillance et sa sagesse. Il aimerait suivre sa voie plus tard. C’est sans compter sa mère. Chirurgienne prônant haut et fort sa capacité à être parvenue à mener une véritable carrière seule, sans l’aide de quiconque. Deux natures si opposées qui pourtant semblent s’aimer. Elle n’est pas là, dans cette église. Un instant de répit au jeune garçon qui craint le moment où il devra rentrer.
Car une fois chez lui, elle va vouloir contrôler ses devoirs et va trouver à redire. Va encore trouver le moyen de repousser un peu plus les limites de la torture. Lorsqu’il rêve d’une vie de petit garçon, souhaitant devenir pompier ou policier, elle prend ça pour un affront. Elle détache sa ceinture et le fouette. Encore et encore. Jamais en présence de son mari.
Elle ne l’a pas vu grandir, son petit Jamie. Elle lui a mis une telle pression durant sa scolarité qu’il a été un élève exemplaire quoique solitaire. Pour elle, le fait d’aider son père à distribuer des vivres aux nécessiteux est une perte de temps. Ce n’est pas la gentillesse qui sauve des vies, mais le bistouri. Sauf que les humains, ce n’était pas trop sa tasse de thé.
Si Jamie a une passion bien à lui, ce sont les animaux. Alors lorsqu’il a opté pour rejoindre l’école vétérinaire d’Athens, ça a été la dispute de trop avec sa génitrice. Son père, quoique se découvrant un cancer, l’a soutenu jusqu’au bout. Il avait beau être épuisé par ces heures à étudier, il était satisfait d’être en bonne voie pour son diplôme.
Quelques camarades de promotion lui ont présentés une fille. Ils étaient si différents, tous les deux. Elle ne pensait qu’à l’argent, le prestige, et le confort. Tandis que lui, dés qu’il le pouvait, il filait rejoindre son père pour veiller sur lui. Lorsqu’il ne le faisait pas, il continuait le bénévolat, distribuant soupe et vêtements chauds aux mendiants. C’est en revenant d’une virée en amoureux en plein hiver que le pick-up de Jamie a fait des siennes. Glissant sur la route, celui-ci s’est retrouvé en biais, percutant de plein fouet une berline. Le second chauffeur est mort sur le coup. Jamie a mis un moment à réaliser ce qui lui arrivait. Son bon vieux pick-up a fait quelques tonneaux avant de finir sur le toit. Le sang d’écoulant de son buste, il découvrit la colonne de direction ayant manqué de peu de l’empaler, mordant sa chair en surface. Il s’est remis de ses plaies en deux mois, l’obligeant à ralentir sur les activités sportives le temps de sa rééducation. Il a pu reprendre ses études quinze jours après les faits.
Alors qu’il était en stage à l’hôpital vétérinaire d’Athens, il se souvient de cette garde où son téléphone a retentit. Son père allait au plus mal. En arrivant dans la chambre, c’est à peine s’il a échangé un regard avec sa mère. Il a eu le temps de lui dire un dernier au revoir. Son père lui a offert sa bible et son chapelet ce jour là et lui a demandé de toujours veiller à ce que quiconque sur terre reçoive l’aide qu’il mérite. Il s’est éteint, emporté par un cancer généralisé.
Les mois ont passées. Il s’est acharné à étudier et aider son prochain. Sa relation amoureuse avançant lentement mais sûrement. Ce n’est qu’une fois diplômé qu’il a décidé de passer à l’étape supérieure. Agé de vingt-six ans, il s’est rendu dans une bijouterie, à acheté une bague de fiançailles et s’est rendu dans le studio qu’il partageait avec sa petite amie. C’est là qu’il l’a surprise. Elle était en compagnie d’un autre. Un ancien camarade de promotion. Nus sur le canapé, il est juste parti.
Il a dormi quelques temps dans le centre d’hébergement que son père avait en partie avec ses économies et en accord avec son testament. Puis il s’est retrouvé un logement. Un duplex. Il a aménagé le rez-de-chaussée de celui-ci en centre de consultation tandis que l’étage était son lieu de vie. Recrutant une assistante et un secrétaire, il était satisfait de son acquisition. Etant souvent en déplacement pour aller dans les ranchs aux alentours d’Athens, il n’a pas vu ces années passées. Ni même cette apocalypse arriver à grand pas.
DURING THE STORMIl écoutait la radio dés qu’il était dans sa voiture. Mais la semaine était chargée. Il devait ausculter le chien d’une famille prés de Monroe. Faire naître un veau dans un élevage et sans doute s’occuper de l’euthanasie d’une vieille jument. Sans compter le nouvel arrivage de moutons qu’il devait examiner avant qu’ils ne soient libérés de quarantaine. Des aller-retours çà et là. Jamie ne comptait plus ses heures. Tout se mélangeait. Et le temps que ces informations trouvent un sens en son esprit, terré au fin fond de cette campagne, l’épidémie était déjà bien avancée. Quelle ne fût pas sa surprise lorsqu’il revint à Athens.
Une ville d’ordinaire si vivante. Maintenant peuplée par le chaos, la mort et les flammes. Il a fui. Fui si loin. Il a erré à bord de son véhicule. Il savait une chose. Si l’information a mis plus de temps à se diffuser en campagne, plus à l’état de rumeur que faits concrets, il y serait plus en sécurité. Moins de monde. Moins de dédales dans les rues.
Sa seule arme de défense a été pendant un long moment un long bâton, digne d’un berger. Cette arme est un héritage de son entraînement à l’aïkido qu’il a pratiqué pendant quelques mois et qu’il a conservé dans sa voiture pour mettre à mal d’éventuels agresseurs. Il a tout oublié sauf son usage. Il a appris à ne pas tuer grâce à celui-ci. Il a noté toutes ses observations dans son carnet. Il a étudié aussi scientifiquement que possible ces morts se relevant. Au départ, il pensait même à une forme évoluée d’Ebola. Il pensait sincèrement qu’on pouvait soigner ces gens en piteux états. Mais quelle ne fût pas sa surprise lorsqu’il en vie un déambuler avec bien des organes vitaux semés par ce trou béant dans son estomac dévoré. Il comprit alors. C’était incurable. Ces gens étaient déjà morts.
Sa voiture est tombée en panne. Une courroi a lâché. Une immense fumée blanche est sortie du capot également et l’odeur de brûlé n’a rien présagé de bon. Il a regroupé les affaires qui lui semblait essentielle dans sa besace, décidé à faire le bien. Il a attrapé son bâton et a continué à pied. S’il a réussi à survivre en se nourrissant de vivres récupérés çà et là, ceux-ci se raréfiant, il commençait à sentir la fin l’envahir. Il n’était pas le seul à manquer de quelque chose. Dans une prairie, une jument tournait en rond. Bien trop à l’étroit dans son enclos, il s’est approché d’elle, a pris le temps de le faire. Elle était blessée sur le flanc. Il a réussi à gagner sa confiance pour la soigner.
Il est resté avec elle un long moment. Et alors qu’il s’apprêtait à lui rendre sa liberté, la jument en a décidé autrement. Elle voulait rester avec lui, lui donnant quelques coups de museaux. Répondant facilement au sifflement, Jamie l’a surnommé Birdie, l’a équipée d’une selle, a pris quelques provisions pour elles ainsi que pour lui dans le ranch à proximité de l’enclos. Puis il a continué sa route. Il savait qu’il ne ferait pas le poids face à une horde sur le sol depuis ce cheval. Son baton ne lui permettant pas de transpercer les crânes des morts. Et il trouvait cela barbare. Il s’en est allé dans une armurerie, décidé à trouver une arme à feu.
Rejoignant le village suivant, il a fouillé le lieu de vente d’armes. Tout avait été pillé. Seuls quelques couteaux restaient présents. L’un d’eux était parfait. Une lame à double tranchant qu’il pouvait aussi bien accrocher à son bâton comme l’en séparer à sa guise grâce à un manche creux et une goupille.
Mais les denrées manquantes, il a erré des jours durant. Sa vigilance et sa concentration manquant à l’appel tant il s’est retrouvé affaibli. Alors qu’il longeait le ranch de Covington, tentant de se faire discret pour ne pas être pris pour une menace par les survivants ayant élu domicile en ce lieu, il a perdu connaissance. Tombant de sa monture pour s’étaler dans la terre.
Lorsque j’ai ouvert les yeux, j’étais allongé dans un lit. On attendait mon réveil. On m’a parlé. On m’a avoué avoir fouillé mes affaires. C’est là qu’ils ont compris. Je ne suis pas un guerrier ni une présence néfaste. Mais bel et bien un médecin. Plus particulièrement un vétérinaire. Les gens du ranch m’ont offert un toit, de la nourriture. En échange, je devais assurer des soins sur les humains comme les animaux. Satisfait de cette situation, j’ai accepté. J’ai trouvé bien plus qu’un groupe. J’ai trouvé une famille, passant cette dernière année en leur compagnie.