Heart's quiver • Alicia

Assise à l'extérieur près de ce qui avait été le feu de la veille, Élise était en train d'éviscérer un lapin et de le préparer pour le soir. Avec le monde qu'il y avait, elle n'avait pas le temps de s'ennuyer et cette activité requerrait même de l'assistance. Mais la cuisinière aimait bien faire ça. Non pas dépouiller de pauvres bêtes pour survivre bien sûr, mais au moins c'était un moment où elle était relativement au calme et où elle pouvait profiter de la nature. Car si elle n'avait rien à redire en ce qui concernait le choix d'une prison comme campement, il fallait en revanche reconnaître que ce n'était pas l'idéal pour être au contact de l'air extérieur. Or, entre les cuisines, sa  « chambre » et ses tours de garde, la survivante ne voyait pas beaucoup le soleil, au sens propre comme au sens figuré. Aussi utilisait-elle cette activité de préparation de la viande pour respirer un peu d'air pur dès que la météo le permettait. Occupée à ses affaires, Élise était perdue dans ses pensées, laissant son esprit vagabonder, lorsque des pas appuyés se firent de plus en plus proche. Manifestement, on venait dans sa direction et, aussitôt, la mère de famille se reconstitua un visage de marbre. Levant son regard, elle aperçut Alicia Valentine qui s'approchait. En guise de salutation, elle lui adressa un hochement de tête. Si jamais le silence valait de l'or, alors Élise serait milliardaire... Sachant pour quelle raison la brune venait, la cuisinière tourna la tête pour chercher sa fille du regard et la prévenir que son professeur était là. Mais Lou avait disparu. La blonde soupira intérieurement, agacée. Sa fille savait pourtant qu'elle s'inquiétait toujours pour elle et qu'elle détestait qu'elle parte sans la prévenir. Vraiment, l'adolescence ! « Lou était là il y a peu, elle ne doit pas être loin. » prévint alors Élise, ses mains toujours rouge du sang des lapins qu'elle dépeçait les uns après les autres dans des gestes précis et rapides qui démontrait son habitude et son habileté à la tâche.

Élise n'avait pas spécialement d'avis sur celle qui entrainait sa fille. Du moment que Lou ne s'en plaignait pas et qu'elle lui apprenait ce qu'elle devait savoir dans les meilleures conditions possibles, le reste importait peu. Pourtant ça n'avait pas été facile au début. Habituées à ne compter que l'une sur l'autre, Lou comme Élise avaient dû faire des efforts pour laisser de la distance s'installer entre elles, notamment et principalement lorsque les activités qu'on leur avait donné se faisaient séparément. Après des années à n'être que toutes les deux, elles avaient dû accepter de laisser d'autres personnes entrer dans leur cercle plus que restreint. Néanmoins, Lou se faisait plus facilement à cet endroit, au point qu'elle s'y fasse des amis de son âge et qu'elle ne veuille plus en partir. Élise, de son côté, continuait de se montrer méfiante, même si elle acceptait les rares interactions que lui proposaient parfois d'autres survivants. Il faut dire que ses réponses monosyllabiques et son indifférence n'en poussaient pas beaucoup à réitérer l'expérience de venir lui parler. Le plus souvent, c'était Lou qui jouait les intermédiaires. Cela dit, la mère de famille devait avouer que sa fille lui parlait en bien de sa professeur, alors Élise se montrait inconsciemment plus encline à écouter et à converser avec cette dernière.

Lui annonçant que Lou n'était pas loin, Alicia décida d'attendre le retour de la jeune fille. « Bien dans ce cas, je vais attendre un peu. » déclara la belle brune alors que la cuisinière ne lui jetait même pas un regard, bien trop occupée avec ses lapins. Des lapins qui lui rappelleraient probablement pour un bon bout de temps le surnom que lui avait donné Daryl. « Lou a du talent et elle apprend vite. » affirma alors la professeure, sans doute pour combler le silence qu'elle trouvait gênant. Élise lui jeta alors un coup d’œil avant de répondre. « Oui, je sais. » La gamine n'avait pas eu le choix, et en dépit d'une génétique qui la reliait à des pervers et à des cinglés, elle était l'adolescente la plus courageuse et possédant le plus gros cœur en or qu'elle connaissait ou qu'elle ait connu. Lou était une battante, et conservait un côté innocent malgré tout ce qu'elle avait pu traverser. Élise en était pleinement convaincue : jamais elle n'aurait tenu le coup sans sa fille pour se raccrocher à la vie, et pour l'aider à avancer. « Vous lui apprenez quoi en ce moment ? » demanda-t-elle ensuite, bien qu'elle le sache déjà, mère et fille se disant toujours tout. Mais à son tour, c'était à Élise de faire un effort puisque Alicia cherchait à se montrer aimable et gentille en lui adressant la parole. Et puis c'était une façon de garder un œil sur une des personnes qui passait du temps avec sa fille.